Premier historien de Saint-Saturnin
Jean Mounition ou
plutôt Jean Claude
Mounition est né le dimanche 13 mars 1898 à Saint-Saturnin lès Avignon;
Il est le fils unique de Louis Mounition et Félise Pelet.
Ses parents tenaient le
bar-tabac sur la place des cafés de Saint Saturnin les Avignon mais son père faisait aussi du négoce
en fourrage. Au tabac, ils vendaient des cartes postales qu’ils
faisaient éditer, c’est pour cette raison que l’on retrouve sur de
nombreuses cartes postales de Saint-Saturnin :
« Edition Mounition Tabacs » Ces cartes postales
datent de 1900 à 1912 environ. Lors des prises de vue nous retrouvons
plusieurs fois Jean Mounition et son père sur les photos. Par exemple
la carte de mai 1910 (ci-contre), prise sur les escaliers de l’église
pour la sortie de 1ère communion, Jean est le 2ème
en haut en partant de la droite, avec le chapeau melon.
Jean avait l’esprit très vif, mais aussi très dissipé;
Ils sont nombreux les ‘mauvais tours’ qu’il jouait à ses parents et
voisins. Il nous racontait que les jours de vacances il préférait
partir tout l’après-midi, sans la permission de ses parents, comme ça
il ne prenait qu’une seule « rouste » le soir en
rentrant, sinon il en prenait plusieurs dans l’après-midi s'il restait à la maison.
Après son certificat, dès
1910, il a poursuivit ses études à l'Institut Joseph
Vernet à Avignon pour aller jusqu’au brevet. Ce qui
n’était pas
chose courante au début du siècle.
A la déclaration de la guerre en
1914, il a 16 ans; Dès 1917, son père qui est très
exposé au front,
lui conseille de s’engager dans l’armée afin de
choisir son
affectation. Il s’engage avec 2 autres copains dont Henri
Bérud et Frédéric
Boussier. Ils se retrouvent tout d’abords
à Nîmes, dans la cavalerie.
Peu de temps après il reçoit un coup de pied d’un
cheval, qui lui brise
le genoux. Ses 2 collègues partent sur le front et quelques mois
plus tard
Henri Bérud fut tué. Grâce à son coup de
pied, Jean reste encore quelques
temps à Nîmes.
En juin 1917, il se retrouve dans le 115e
Régiment d'Artillerie Lourde, 61e Batterie, Peloton 2. Il
séjourne quelque temps à Grenoble, puis il part en Italie
tout à fait à la fin de la guerre, puisque le 11 novembre
1918 il est à Turin et se retrouve 8 jours
après à Castelfranco, près du Lac de Garde.
Là il est incorporé dans le 309e Régiment
d'Artillerie Lourde, 2e colonne légère, secteur 8.
Malgré les difficultés
de la guerre, il en a gardé un souvenir impérissable et
en a parlé toute sa vie bien que son séjour fut
très court en Italie, puisqu'en janvier 1919 il est de retour
à Modane.
Après une année passée
dans les Ardennes, il finit son armée à Nantes dans
le 51e Régiment d'Artillerie.
En 1925 Jean épouse Marie Aymard de Morières, ils auront
2 filles et Jean reprends l’exploitation agricole ; son père
étant décédé l’année précédente.
Jean Mounition aimait beaucoup le chocolat, même pendant
la guerre il se débrouillait toujours pour en avoir à porter de mains
dans les sacoches pendues à la selle de son cheval. Puis, durant toute
sa vie il en a mangé beaucoup; Il en mangeait un kilo par semaine, que
du chocolat noir d’Aiguebelle. Vers la fin de sa vie il disait qu’il en
avait mangé 3 tonnes. Ce qui est peut-être sous-estimé.
Jean est revenu malade de la guerre, il avait attrapé
une dysenterie amibienne qui ne guérissait pas et que l’armée
n’a pas voulu reconnaître comme maladie invalidante.
Voyant que le mal ne passait pas et que les docteurs y
perdaient leur savoir, il ne savait plus à quel saint se vouer. C’est
comme ça qu’il s’en est remis à Saint Gens, le grand Saint de la
Provence. Il buvait l’eau de la source miraculeuse et Marie, son
épouse, avait fait porter au curé du Beaucet de quoi dire une neuvaine
de messes. Celui-ci n’ayant pas eu le temps immédiatement, il les dira
quelque temps plus tard. Et c’est effectivement quelques temps plus
tard, que Jean fut entièrement guéri. Les docteurs n’en revinrent pas,
mais lui, affirmait haut et fort qu’il avait été miraculé de Saint
Gens. De ce fait, il a porté toute sa vie une très vive dévotion à
notre Saint Provençal. Avec son épouse, ils ne rataient aucun
pèlerinage. A tel point qu’une de ses filles épousa un garçon du
Beaucet.
Jean était très philosophe, érudit et curieux de tout,
dès sa jeunesse il était passionné d’histoire. La première fois qu’il
est allé aux archives départementales, sur le premier document qu’il
consulte, il tombe sur un texte très ancien qui parle d’un Jean Claude
Mounition, consul de Saint-Saturnin. Ce fut le déclic, depuis ce jour
là, il fréquenta régulièrement les archives. Il éplucha pendant des
années les archives communales, il lui est même arrivé d’être enfermé
le soir dans la mairie, alors que la secrétaire l’avait oublié dans les
archives.
Il était passionné par les vieux papiers et
souvent
lorsque qu’il y avait des stocks qui arrivaient à la gare
à destination
de la papeterie de Gromelle, il allait les fouiller et trouvait des
trésors, trésors uniquement à ses yeux. Son
voisin, M Marini était transporteur, son autre voisin M
Leprêtre était le chauffeur du poids lourd, il garait ce
derneir dans la remise en face de la maison de Jean. Souvent le camion
chargé de vieux papier à destination de Gromelle, passait
le week-end en attente de déchargement le lundi et
Jean passait son dimanche après-midi au sommet du chargement
dans l'espoir de trouver une "merveille".
Jean Mounition a marqué tout le village par ses
déplacements en charrette lorsqu’il allait à ses terres. Son brave
cheval, Coquet, était très docile, c’est lui qui conduisait, car Jean
durant tout le parcours avait la tête dans ses livres. Pour le retour,
il n’y avait pas de problème, le cheval ne se trompait jamais, il
rentrait toujours directement à la maison; par contre, à l’aller, ce
n’était pas toujours le cas. Ce fut un des derniers agriculteurs à
posséder un cheval à St-Saturnin, c’était vers la fin des années 70.
C’est souvent que, le dimanche après-midi, il allait au
Puy avec un livre pour passer un moment dans la colline. Il avait
toujours sa loupe sur lui pour allumer sa pipe, c’était bien meilleur
qu’avec une allumette.
Un
jour, fin des années 60, il rencontra M Durrieu qui habitait au sommet
du Puy. La conversation s’engagea et celui-ci, en parlant de
St-Saturnin lui dit que c’était un village qui n’avait pas d’histoire.
Qu’est ce qu’il n’avait pas dit ? Jean lui fit part de toutes
les recherches qu’il avait faites sur l’histoire du village. Alors M
Durrieu lui proposa de lui éditer toutes les notes qu’il avait
accumulées depuis tant d’années. Jean dans un premier temps, refusa
,car il n’avait jamais imaginé qu’un jour il pourrait en faire un
livre, mais M Durrieu insista et c’est ainsi que « L’Histoire
de Saint-Saturnin les Avignon » a vu le jour. Jean lui
fournissait la matière première et M Durrieu s’est occupé de tout le
reste à titre gracieux. La mise en ordre de toutes ses notes fut
laborieuse, car tout était écrit sur des bouts de papier, dos
d’enveloppe, etc.. Puis finalement l’édition a pu être réalisée en 1970.
Grâce à la rencontre de ces 2 hommes, nous pouvons
aujourd’hui tenir entre les mains le fruit du travail de fourmi qu’a
représenté la recherche de toutes ces informations. Ce livre
« L’Histoire de Saint-Saturnin les Avignon » nous
retrace avec minutie et sans fioriture, l’histoire de notre village.
Son épouse, Marie, a eu beaucoup de patience pour
admettre tout le temps que son époux passait dans les vieux papiers et ce
n’est finalement qu’à la sortie du livre qu’elle réalisa l’importance
de ses recherches.
Jean est décédé le samedi 2 août 1983 à l’âge de 85 ans.
Le livre est malheureusement épuisé depuis longtemps.